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Une source en partage


L’hiver s’en va, l’hiver est encore là. En cet après-midi brumeux, il était important, essentiel, vital, d’aller rendre visite à cette source discrète, presque secrète, qui sourd au pied du vieux Granier. En toutes saisons je vais la saluer, des rires du printemps jusqu’aux richesses de l’automne ; elle est à deux pas du chemin, évidente, inconnue, éternelle, puissante. Aujourd’hui aucune trace dans la neige ne s’en approche : elle sera donc pour nous seuls. Comme toujours, le flux rassurant jaillit d’une cheminée verticale, étrange résurgence issue des profondeurs du vieux Mont, puis s’écoule en riant vers la vallée des hommes. Je sais que la nuit, dans cette petite combe forestière, se rassemblent sans doute ici tout le peuple du petit monde, fées, Morganes et Oréades enchanteresses. Je sais que de curieuses ondes entourent cet endroit, et l’on y reste un moment, forcément, comme on s’arrête dans le transept d’une cathédrale, comme on s’inonde de lumière devant un tableau de Cézanne, comme on boit le silence après une aria de Bach. Je sais que cet endroit précieux est plus qu’une source, il est « la » Source de toutes les vies, l’outil de toutes les bienveillances. Souvent, l’été, j’aime aller cueillir un peu de son eau pour réaliser ces « élixirs floraux », qui prétendent transporter l’énergie des fleurs pour soulager peut-être les peines de l’âme humaine. J’y reviens souvent, y amène des amis pour partager respectueusement le secret. L’eau, les plantes, la vie. Forcément.

Aujourd’hui, la neige entoure encore pour quelque temps la bouche de ce courant secret. Je lirai sur ses lèvres longtemps, en toutes saisons, les mots des poètes et ceux de la vie.

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