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L'escalier esse

On part en Voyage comme on part en Amour. Et le meilleur, en apparence, est dans les préliminaires, quand, conduit par le désir, on pressent les fulgurances. On consulte, on apprend par cœur les cartes, les portées et les itinéraires, imaginant la grammaire des combes, les sommets et les obstacles, on emplit son sac de tendresses et de sages prudences, pour se rassurer sur le chemin à venir. Mais sitôt les premiers pas, l’esprit déjà s’enflamme, oublie les belles géographies, et trouve par intuition la ligne de crête et de lumière. Ainsi le Voyageur amoureux des paysages s’en va cheminant, oubliant enfin retenues, métriques et convenances, et s’invente une musique nouvelle, scintillante, évidente, loin des manuels d’amour et des solfèges gris. Dans quelques jours, je pars au Sud. Ici, en Entremonts, l’hiver s’effrange en pluies neigeuses et les prairies hésitent. Sur les Hauts persistent des archipels de silence et de glace, que soldanelles et crocus défient avec couleur et arrogance, je l’ai vérifié hier matin. Les sentiers de Chartreuse, Vercors, Diois et Baronnies m’appellent lundi vers le Mont Ventoux, la montagne monstrueuse, le dernier promontoire, au sommet duquel, dans mon enfance, je l’affirme, moi j’ai appris à faire se lever le soleil. Je retourne à l’exercice. J’y vais cette fois en baguenaud, en promeneur, en libertaire, en herbographe, en amoureux des mots, des arbres et des gens. Voici cette chronique inutile de l’Escalier essentiel. Il y a trop de noirceur au monde : je veux retrouver le jour. Il est là-haut, l’Amour. Je le sais. Je vous emmène. 

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