CARTE DE VOEUX

Ouvrez mes collections, fouillez tous mes placards : Vous trouverez des mots que personne n’invite Aujourd’hui dans les livres et les savants colloques ! Je les garde précieux dans une boîte en fer blanc Qui renferma jadis nougats et calissons, Avec sur le couvercle un Van Gogh fatigué.

Je vous offre en ce soir le mot de « girandoles » : On nomme ainsi les jets d’eau à la villa d’Este ; Et aussi l’« organdi », de claire mousseline, Pour en parer les nymphes, gouttant de la fontaine. Ces deux mots-là me plaisent, et je vous les confie. La langue, dit-on, se rouille quand on la tait : Il faut la brosser souvent pour qu’elle brille plus fort.

Ouvrez mes collections, fouillez tous mes placards Vous trouverez au fond d’un carton à chapeau, Dans des enveloppes dont le papier a flétri, De vieilles cartes postales. Ca, je vous autorise A les lire, mais respectueusement : « Baisers de Cauterets », « On pense à vous très fort », Cela se mérite, Mais les lettres d’amour, entourées d’un ruban, Je vous interdis, Formellement, D’en prendre connaissance.

Ouvrez mes collections, fouillez tous mes placards Vous trouverez peut-être, s’il elles ont tenu bon, Face aux résolutions d’un matin de printemps, - Vous savez, celles qui, tel le chant de Circé, Hélas, vous entrainent à la déchèterie, Ce lieu de sacrifice à la vie qu’on croit neuve - Les cartes de bons vœux, du temps du timbre-poste : « Bonne année, bonne santé, à ceux que vous aimez ». C’est le message ourlé de paillettes d’argent, Qui doucement se dispersent au vent du temps qui passe.