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LA FOUGERE ET LA SCOLOPENDRE




« -Gardons nos distances ! », disait une belle fougère A sa voisine scolopendre. « - Vous êtes une pataude, moi j’ai l’air militaire ! Voyons, nul ne peut se méprendre, Mes feuilles de partout sont ornées de festons. Mais les vôtres fort ennuyeuses, Tout à fait rectilignes, enfin, admettons ! Mais dites-moi, je suis curieuse, Quel est votre secret pour les faire brillantes ? Les frottez- vous à l’encaustique ? Ou au cirage, ou une pâte équivalente ? Parlez ! Quelle est votre technique ? Moi chaque matin, c’est la rosée qui me coiffe. Quoi pour moi d'anormal, pour une polystiche ? Elle me désaltère quand j’ai soif, Et ses gouttelettes me frisent les barbiches.


Vraiment, vous êtes ridicule ! J’ai appris qu’on vous dénommait « langue de cerf ». Ce pseudo est vraiment nul ! Vous devriez en trouver un plus littéraire… Moi on m’appelle l’herbe magique, Car on dit que celui qui récoltera mes graines Aura le pouvoir fantastique De devenir invisible, non mais, quelle veine ! »


La belle ne cessait de parler, De discourir sur le luxe, la volupté D’être superbe, et le rester. Mais elle ne vit pas arriver un sanglier Qui, sans doute, utilisait son droit de glandée, Pour se goinfrer et tout le talus labourer. Les deux fougères en furent toutes retournées Des deux, seule scolopendre resta attachée A la terre : son rhizome était mieux cramponné Que celui de la belle qui ne cessait de parler, Et la bavarde officière fut déracinée.


Ecoute bien, ami, avant de pavaner, Si jamais le sol tremble, prends garde au sanglier !



Le Polystic à aiguillons, Polystichum aculeatum L. La scolopendre, Asplenium scolopendrium L. Les Echelles(73) le 5 février 2021 Texte et photo © Yves Yger, février 2021








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