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Botanica mundi

J'ai rejoins Tours conduit dans la voiture de Christophe, le temps me manquant pour arriver au Parc Terra Botanica, près d'Angers, où je dois présenter des animations. Les mille et un détours des chers sentiers de Grande Randonnée, les journées sympathiques et imprévues de tournage pour la télé m'ont fait prendre du retard sur mon cheminement. Ce n'est pas grave. Je ne réalise pas là une performance physique, mais un parcours personnel et artistique.

Terra Botanica ! Le nom est si beau ! Je découvre un lieu étrange. Une nature reconstituée, au deuxième degré, ce jour-là inondée de soleil, où se promènent des familles sages et des couples d'amoureux. Une sorte d'immense animation en trois dimensions, un peu trop parfaite, techniquement bien construite, où les plantes, les arbres et les gens semblent plutôt heureux. Il est vrai que ce « concept » est bien loin de la Nature que je fréquente habituellement, mais je conçois que ses créateurs aient pu imaginer attirer ainsi un nouveau public afin de la leur faire découvrir. Il faut simplement souhaiter qu'après cette bande-annonce en imagerie de synthèse, on ait envie de voir de vrais films, et de devenir acteur. Le grand mérite de ce lieu est d'être un activateur de curiosité.

Je présente une version raccourcie de ma « Saga Botanica », qui ne semble pas passionner le maigre public, qui attend du spectacle formaté et consommable. C'est ainsi, la vie d'artiste... Douloureux décalage... et salutaire leçon !

La Nature peut-elle comme ici être décor et lieu de consommation ? Pour moi, elle est trop complexe, excessive et injuste parfois, fangeuse, violente, et plus que de beauté, notion subjective et somme toute banale, elle est source et révélatrice d'émotions intérieures. Elle est l'harmonie et la tempête, le miroir de nos élans, de nos peines, de nos amours, et de nos interrogations profondes.

Oui, en elle je suis vivant, et cela me rend plutôt joyeux.

Certains soirs, je ressens si profondément comme le jeune Scipion, du Caligula de Camus, ce vertige « d'un certain accord de la terre... (…) de la terre et du pied. (...) et aussi de la ligne des collines romaines et de cet apaisement fugitif et bouleversant qu'y ramène le soir... (…) Et de cette minute subtile où le ciel encore plein d'or brusquement bascule, et nous montre en un instant son autre face, gorgée d'étoiles luisantes. (…) De cette odeur de fumée, d'arbres et d'eaux qui monte alors de la terre vers la nuit. » *

Ce soir, j'observe le coucher de soleil. Je hume ces senteurs et fais partie de ces Noces.

Yves YGER

* Extrait de Caligula, Albert Camus.

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